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Et la suite
Jour 9 – Inari (Finlande)
La tête dans le brouillard, petit-déj.
Check-out. Il y a de la place ce vendredi au cas où un demi-tour s’imposerait…
Je nettoie les restes de neige et de glace. Autant partir léger
12h30, direction la station-service à côté de l’hôtel. Plein et contrôle des pressions : il manquait 300 g à l’avant et idem à l’arrière

…
J’ai décidé de prendre la route quand même plein nord quitte à faire demi-tour si les conditions météo restent mauvaises et donc que la route est fermée.
Toujours les convois
Je me dirige alors vers la Norvège et reprends cette superbe route en toboggan régulièrement traversée par des rennes.
Elle est tout de suite moins impressionnante : elle est bien plus large, la neige recouvrant le bas-côté et point de bêtes, la neige étant trop profonde. Je continue, le ciel est toujours gris.
14h40, arrêt à Lakselv pour faire le plein. Pas de 98. Je remets 20 L de 95, avale un hotdog avec les crispy oignons. Ce sera mon déjeuner-goûter

Il fait -6° mais un putain de vent de 50 km/h constant avec des rafales à 70 km/h (données météo réelles) rend la marche difficile et me frigorifie

J’ai failli me casser la gueule en sortant de la voiture. Pour en faire le tour, je me tiens à l’aileron
Par contre les Nokian sont parfaits ! Même sur la glace, aucune amorce mesquine. Il faut soit mettre gaz sans douceur ou freiner comme sur du sec pour que la GT3 quitte son rail. A mener avec doigté…
Je demande aux caissières de la station si elles peuvent vérifier sur le site norvégien officiel si la route est ouverte. Il est d’ailleurs très bien fait (maj en temps réel, horaires des convois, caméras en temps réel même au bout du monde).
Route ouverte
J’aurais de toute façon tout fait pour passer quitte à attendre les convois. Monter si haut et renoncer me fait penser à Stephan notre instructeur/pilote circuit préféré dans Pouas « on garde les gaz… ». Stephan, si tu me lis
Je repars et commence donc à longer la Mer de Barents, sa partie sud est complètement gelée et blanche de neige.
Je m’arrête au même endroit qu’en 2014.
Je continue de monter et rentre à l’intérieur des terres. A la sortie d’un virage elle apparait, mouvante, oscillant par endroit entre le turquoise et le bleu flippant. Ca souffle très fort. Je sens que la GT3 est chatouillée sur sa gauche. Je frissonne à l’idée d’avoir une galère ici dans le froid accentué par le fort vent
Côté revêtement routier, dès le passage de la frontière norvégienne, la neige a laissé place à deux sillons dégagés de toute neige mais parfois recouverts d’une fine couche de glace et assez étroits. Sur les côtés, de la glace bien dure et épaisse. Aïe ! En plus, quand on passe sur certaines zones, effet vibreur garanti

. Il va falloir bien viser
La lumière s’estompe et le grain des photos en témoigne. Les xénons commencent à découper le muret de neige en bord de route. Au sol, ça brille et je ne souris pas
Je passe la première barrière, fermée la veille et en convoi encore ce matin. Le soleil se couche sur ma gauche et la lumière est magnifique. Le sol est recouvert de neige et une couche de glace en dessous qui scintille toujours.
Pour l’instant pas de glissade non sollicitée. Pause photo avant que la nuit tombe.
Je passe ensuite un premier tunnel de 4km avec ouverture automatique des portes. Du goudron et la température qui monte. Ca fera peut-être fondre un peu la glace qui s’accumule dans les passages de roues et sous le bas de caisse. Tu parles !
Il fait nuit noire et tant que je peux, plein phares pour prévoir tout écart bien à l’avance à cause des congères qui tombent des camions, des voitures
J’ai dû donner un petit coup de volant en sortie de virage à la vue d’un bloc qui a eu l’impolitesse de ne pas s’annoncer

Neige ou glace, faut éviter dans le doute

Il y a quelques voitures dans les deux sens.
La neige a laissé place à de la glace sur la route. Je baisse le rythme, 50 km/h. En ligne droite, aucune barrière pour me rattraper et en dessous, la Mer de Barents sombre et agitée.
Je retraverse les spots de 2014 mais cette fois ci, c’est une toute autre ambiance…
Ca commence à être un peu flippant

Je ne fais pas le fier
Le fort vent latéral fait s’affaisser le mur de neige, augmentant un peu plus la tension. Je m’étais fait surprendre à plus de 70 km/h par un tas sur ma gauche entre Levi et Inari. Pas de contraste sans lunettes de soleil. Ca fait bizarre quand on tape dedans
Le tunnel de 6.9 km est en vue.
Feu rouge. Le vent, s’engouffrant dans le couloir entre deux montagnes, pousse la poudreuse jusqu’à l’entrée du tunnel. La porte remonte et je rentre dans ce qui sera le seul moment de douceur depuis Paris.
-3, -1, 0 et puis 6° tout en bas à –212m sous le niveau de la mer dans le brouillard.
Au-dessus de ma tête, bien au-dessus, la mer glacée, agitée, effrayante. J’en profite pour laisser la GT3 donner de la voix, répliquer, défiant ainsi les monstres marins grattant le toit de ce tube

(je ne suis sous l’emprise d’aucun produit

)
Ça remonte, 1/5 km sur le dernier panneau. La sortie est proche et la température redevient négative. Feu au vert pour cette avant-dernière porte. A la dernière, feu rouge. Je patiente pendant la remontée de la porte et de grosses rafales de vent s’engouffrent

Brrrrrrrrrrrrr
L’ambiance est toujours particulière ici. Cette fois-ci, tout est blanc, les halos de l’éclairage public jaunissent la chaussée, elle-même basculant du miroir strié au tapis de poudreuse vite balayé par le vent. Le fond de teint ne tient pas et je serre un peu les fesses
Après 18 km de roulage sur l’île de Magerøya, j’arrive au croisement : à gauche Skarsvåg et Nordkapp, à droite Honningsvåg où j’ai réservé à l’arrache 90 km plus tôt au Scandic Bryggen.
18h40. J’y suis. La troisième case est cochée
- GT3 sur la neige et la glace. CHECK !
- Les aurores boréales. CHECK !
- Atteindre en hiver l’île de Magerøya où se trouve Nordkapp. CHECK !
Je me gare à l’arrière de l’hôtel où l’engin de déneigement a dégagé le parking en laissant un petit monticule, type trottoir. Ca souffle un peu moins à Honningsvåg par rapport aux 20 derniers km sur l’île. Il ne fait que -2° mais avec le vent, on enlève au moins 10° en ressenti. L’hôtel est face à la mer, dans le port. Check-in et direction la piaule.
Ce soir burger dans un pain à focaccia
Je scrute le ciel. On ne voit pas les étoiles. C’est mort pour les aurores boréales

Mais sait-on jamais, le vent peut tout changer ici.
Rassasié et un coca pour un peu de peps (au cas où je sortirai en caisse). J’ai limité le café à celui du matin, l’effet lémurien en plus de la fatigue étant proscrit. Je classe les photos et vidéos.
A 00h30 je mets mes pompes, prépare la cagoule, les gants, une bouteille d’eau chaude et direction là-haut. Je quitte l’hôtel et traverse le centre désert à part quelques personnes qui se dirigent vers le restau pub, le Corner Cafe, où j’avais déjeuné la dernière fois en terrasse. C’est loin…
Je passe l’aéroport. D’ailleurs aucun avion ne doit se poser ces derniers jours vues les rafales… Je continue ma montée. Je roule sur de la glace. Ca brille comme un glaçon. La GT3 ne bronche pas et monte tranquillement à 40-60 selon que ça tourne ou pas. Le lendemain, je me suis arrêté pour vérifier les GoPro et j’ai failli me casser la gueule une nouvelle fois.
Plus d’éclairage public, plein phares.
Ca souffle. La neige, dégagée sur le côté, coule sur la route comme une bouteille d’azote liquide débordant de volutes de vapeur.
J’enchaine la montée toute en lacets pour arriver sur le plateau.
La poudreuse danse devant la GT3, elle sable le côté gauche, et je sens le vent qui pousssssssse
Je continue tranquillement sans dépasser les 50, car le bord de la route a disparu dans le brouillard de neige, je ne vois que le haut des piquets réfléchissants.
15 km dans cette ambiance surréelle, flippante. Je ne fais pas le malin même si au cas où un souci surviendrait un coup de tel et l’assistance débarque.
Il est juste 1h00 du mat et une GT3 noire fend de ses xénons l’obscurité où virevolte la neige.
Mot de passe : nordkapp
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J’aperçois le parking sur la gauche et depuis lequel on aperçoit la mer (de jour

). Je m’y arrête, coupe les feux pour voir le ciel.
Que dalle.
Noir total.
Juste un vent continu, glacial.
Mot de passe : nordkapp
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La GT3 est en tenue de soirée camouflage. Sans paillettes. Je tente une sortie. J’ouvre la portière. Rien. Je retente en poussant avec les deux bras. Il faut que je la tienne, sinon elle claque.
Il faut quitter le baquet et tenir la portière. Putain c’est chaud ! Je pousse, me dégage et la laisse se fermer toute seule à la force des rafales.
Cagoule, chapka et gants. Je tiens 3 min avec la neige qui fouette. Je remonte au chaud, frigorifié même équipé. Je décide de rentrer, c’est un peu flippant cette ambiance fin du monde. Je descends prudemment la route qui me ramène vers Honningsvåg. C’est toujours de la glace.
A un virage je me retrouve face à face avec un engin de déneigement. Il coupe un de ses phares et son bidule qui expédie la neige sur plusieurs mètres de haut. J’apprendrai le lendemain que c’était le proprio de l’hôtel de 2014 à Skarsvåg qui, effectivement, bosse bien au déneigement en hiver.
Je jette un dernier coup d’œil aux prévisions pour les trois prochains jours :
Il est 2h, je me couche avec le ronronnement d’un moteur diesel d’un des bateaux dans le port. Je l’oublie et sombre.
A peine les yeux fermés, que les images défilent...
Mot de passe : nordkapp
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Inari (Finlande) > Honningsvåg (Norvège)
353 km
50 km/h
10 L/100