Voici venu le temps de divulguer, pas à pas, les contours de cette 5ème Virada.
C'est la troisième fois depuis le début de la Classica que nous sommes hébergés à Pra-Loup, et nous allons cette année plonger dans les racines de cette station.
Ouvrez grandes vos esgourdes, pensez à nos pères et sentez cette odeur d'huile grasse, de cigarettes brunes et de Génépi mêlés, d'aventure individuelle et de coups tordus, de vision sociale et d'intérêt financier...
La région disposant de faibles ressources, principalement axées sur la production de blé dur ou de Lavande, d’élevage et de tourisme estival, le Conseil Général envisage dès la fin des années 50 le développement touristique de la vallée de l'Ubaye en créant un pôle d'attraction tourné vers les sports d'hiver. Les investisseurs sont invités à se joindre à l'étude du projet.
Présent dès l'origine du programme, un homme, montagnard confirmé et ancien courtier en bourse des matières à Lille, va prendre en main son destin et, dans un premier temps avec l'aide de soutiens financiers venus du nord, va accomplir l'oeuvre d'une vie, tel un bâtisseur de cité idéale. Il s'appelle Louis Lequette et son nom sera pour toujours associé à la grande histoire de la région.
Les domaines du Sauze ou de Saint-Anne sont d'abord pressentis pour accueillir cette nouvelle station de ski, mais les appétits et la méfiance ont tôt fait de torpiller les bonnes volontés. Qu'à cela ne tienne, Louis Lequette est fait de ce bois vivant qui repousse quand on le coupe, qui tord la croissance de ces branches pour chercher le soleil et qui se tait lorsque l'hiver est trop rude.
Son attention se porte alors sur les flancs de la commune d'Uvernet, dominés par le plateau de Pra-Loup. Suivant l'exemple des moines, la population s'était installée aux Molanes, à mi-pente. Son exposition nord-est, à l'abri des vents dominants, en particulier du mistral remontant la vallée, permettait un enneigement durable, visible depuis Barcelonnette et qui donna son appellation au quartier des "Blancs"...
Sur le plateau, une seule ferme était construite. Nulle route, ni conduite d'eau ni réseau électrique. La commune était pauvre et la mission paraissait impossible, utopique.
Hors de portée des jalousies, Louis Lequette réalise une étude de faisabilité convaincante et obtient l'aval de la municipalité qui lui ouvre bientôt les portes de la chambre de Commerce, du Conseil Général, de la préfecture, de la députation et de Matignon. Une société d'économie mixte est créée, à charge pour elle de gérer les travaux d'infrastructures (remontée mécanique, routes, réseaux énergétiques), la délivrance de terrains en propriété, la mise en place d'un tissus économique garantissant des emplois, la préservation des sols agricoles et des spécificités géologiques, les droits de passages, les relations avec les élus et la détermination des investisseurs. La première assemblée constitutive compte 22 actionnaires et se tient le 27 mai 1960, juste un mois après la visite studieuse et approbative de Jean Vuarnet, qui apporta comme tant d'autres sa pierre à l’édifice, malgré qu'il fut recruté par la station de Morzine quelque temps plus tard....
Avec l'arrivée de nouveaux investisseurs, d'augmentations de capital en contraction de crédits, la "SATIS" - dont Louis Lequette était le directeur général - se lance dans les travaux. Et d'abord la route. Plus d'une tonne de dynamite, 10 tonnes de ciments, des kilomètres de lignes à basse tension, 21000 volts à délivrer, le déboisage, toutes les fondations des pylônes de téléski et leur implantations, l'acheminement de l'eau de consommation (celle du ravin, naturelle, la première année) et celui des eaux usées, la construction des premières structures d'accueil, restaurant, hôtel, l'organisation des lotissements d'habitations, les camions à entraînement à chaînes, les déplacements à pieds en peaux de phoques, les accidents, les contre-temps, et toujours, la vision de cet avenir qui se construit ici et maintenant, à la force du rêve !
La station de Pra-Loup ouvre le 20 décembre 1961. Louis Lequette devient maire d'Uvernet en 1971.
Mais l'Histoire est ainsi faite qu'elle doit plus à sa longueur de temps qu'aux initiatives ponctuelles. De rumeurs en délations, d'obstacles choisis en menaces de mort, de mutation de sociétés en plaidoiries au tribunal, de promesses en magouilles, Louis Lequette finit par jeter l'éponge au début des années 2000.
En 2008, il entreprend avec la même fougue qu'aux premiers jours la réfection de l'hôtel qu'il détient aux Molanes, sur cette cote que les "mexicains" de Barcelonnette ont si justement nommé "Les Blancs".
Et en 2016, il accueille les viradistes.
Retrouvez toute l'histoire de Pra-Loup et de Louis Lequette ici :
http://praloup.histoires.free.fr/index.htm
Pra-loup, hiver 1959 :
La maquette du projet en 1960 :
Les travaux routiers :
Ouverture de la station en 1961 :